Pourquoi voir ou revoir Le cochon de Gaza de Sylvain Estibal ?
1. Parce qu'on notera que c'est là le premier long métrage de ce réalisateur, réalisateur qui n'en est d'ailleurs pas un puisque Sylvain Estibal est initialement journaliste-photographe pour l'Agence France-Presse. Et franchement, pour un premier film, il est plutôt bien réussi !
2. Parce que le fait d'introduire un cochon en plein milieu du conflit israëlo-palestinien et de plus est, faire de lui l'un des personnages principaux du film devrait déjà vous intriguer et vous donner envie de le découvrir.
3. Pour l'originalité du choix des acteurs. Sylvain Estibal a en effet choisi de faire jouer un pêcheur gazaouite par Sasson Gabai, un acteur israélien d'origine irakienne, et une éleveuse de cochon juive par Myriam Tekaia, une actrice tunisienne. Ainsi le réalisateur joue avec les nationalités et s'amuse à "brouille[r] les pistes" comme il le dit lui-même, ce qui introduit une première question sur l'identité et les ressemblances entre ces peuples et même entre les peuples, question centrale dans la thématique du film.
4. Pour voir comment ce pauvre Jafaar, pêcheur usé par la vie, par le blocus israélien, la réquisition de sa villa par l'armée israélienne et les railleries de sa société reste foncièrement bon et fidèle à ce qu'il est et arrive, en dépit de toutes ses mésaventures, à tirer profits et leçons de sa situation. Il fait preuve à maintes reprises d'une ingéniosité et d'un grand humanisme auquel on ne saurait être indifférent et quand bien même il est présenté comme un anti-héros au début du film, il mérite bien le statut de héros à la fin de cette aventure.
5. Parce que la vision qu'offre ce film sur le conflit israëlo-palestinien est relativement novatrice. Sylvain Estibal, de par sa profession initiale a eu l'occasion de travailler à maintes reprises sur ce sujet et a mis à profit les leçons tirées de ces travaux dans ce premier film. Il a ainsi eu l'occasion de réaliser un reportage-photo au cours duquel un appareil photo était attribué à des familles de colons juives et à des palestiniens de Gaza auxquels il était demandé de se prendre respectivement en photo au quotidien. Il a alors noté les fortes ressemblances entre ces deux camps. Et c'est en choisissant l'une de ces ressemblances comme intrigue (à savoir la crainte du cochon) et en la traitant de façon tout à fait comique que Sylvain Estibal nous questionne sur la capacité à cohabiter pacifiquement de ces deux peuples. On apprécie donc la simplicité, voire la légèreté parfois (mais sans jamais dédramatiser cette situation conflictuelle), avec laquelle ce sujet est traité et qui change du ton grave avec lequel on l'appréhende habituellement, l'absence de parti-pris et enfin l'humour fin et cocasse que les situations induites par l'intrigue procurent au film.