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Quelle importance donner à la distance institutionnelle dans l’attraction des IDE?

Cet article est un résumé de l’article FDI from the south: The role of institutional distance and natural resources de Mariya Aleksynska et Olena Havrylchyk (CEPII).


 

Les investissements directs à l’étranger (IDE) sont les mouvements internationaux de capitaux réalisés pour créer, développer ou maintenir une filiale à l’étranger ou pour exercer le contrôle ou une influence significative sur la gestion d'une entreprise étrangère. Autrefois majoritairement réalisés par les pays du Nord, de nouveaux acteurs se dégagent. Les pays du Sud, principalement la Chine mais aussi le Brésil, Hong Kong, l’Inde, la Malaisie, l’Afrique du Sud, Singapour, la Corée du sud et les Emirats arabes unis constituent désormais des pays émetteurs d’IDE pesants sur la scène mondiale. Ces nouveaux investisseurs ont-ils des comportements et des rationalités d’investissement différents de ceux du Nord ? Il semblerait que ce soit le cas.


En effet selon les auteurs, les déterminants de l’IDE diffèrent selon l’origine de l’investisseur. Les facteurs culturels et géographiques (langue ou frontière commune, similitudes dans le passé colonial) semblent plus importants pour les investisseurs du Sud que pour ceux du Nord. Mais la principale différence dans les comportements d’investissement réside dans ce que nous pouvons qualifier de « distance institutionnelle ». La distance institutionnelle est la différence entre la qualité des institutions du pays d’origine de l’IDE et le pays récepteur. Elle est traditionnellement entendue comme distance absolue : plus les institutions de deux pays sont éloignées (loi, droits de propriétés, gouvernance etc.), plus cette distance est élevée. Les auteurs apportent une innovation aux articles antérieurs sur le sujet, en distinguant distance institutionnelle « positive » et « négative ». Une distance positive revient à dire que l’investisseur va s’engager dans un pays avec de meilleures institutions que celles présentent dans son pays d’origine. Réciproquement, la distance est dite négative si l’investisseur se tourne vers un pays avec de moins bonnes institutions.


Les résultats économétriques montrent que les entreprises du nord investissent différemment de celles du sud. En effet, les investisseurs du nord vont rechercher une distance institutionnelle la plus faible possible : ils vont chercher à investir dans des pays qui leur ressemblent en terme de lois, de droits de propriété et de gouvernance. En revanche, on remarque pour les pays du Sud qu’une distance institutionnelle positive forte entre pays émetteur et destinataire de l’IDE peut être déterminante. On imagine donc qu’un acteur du sud sera désireux d’investir dans un pays où il existe de meilleures institutions. Cela s’explique par la volonté de bénéficier de transferts de technologie, de profiter de la qualité des infrastructures et d’une meilleure gouvernance que dans le pays d’origine. La significativité de ce paramètre est robuste aux tests économétriques.


Cependant, 80% des IDE Sud-Sud se font vers un pays avec de moins bonnes institutions. Comment cela peut-il s’expliquer étant donné que nous venons de voir qu’une distance institutionnelle positive pouvait être un facteur d’attraction d’IDE ? Deux raisons peuvent être avancées. Premièrement, les pays du Sud disposent majoritairement d’institutions de faible qualité. Les investisseurs des pays émetteurs investissent donc où ils peuvent, mais lorsque les institutions du pays récepteur sont de moins bonne qualité, elles le sont en fait marginalement. On retrouve ici un comportement presque similaire aux investisseurs du Nord, à savoir de se focaliser sur des pays avec des institutions proches de celles que l’on trouve dans le pays d’origine.


La deuxième raison trouve ses origines dans la prise en compte du stock de ressources naturelles du pays d’accueil. On retrouve dans la littérature qu’une forte dotation en ressources augmente la probabilité de conflits pour un pays, tout en dégradant la qualité des institutions (présence de corruption due aux effets de rente). Lorsqu’un pays dispose d’un stock de ressources fossiles supérieur à 9000 USD/tête, alors la qualité des institutions ne représente plus un frein pour les investisseurs des pays du Sud. A l’inverse, des institutions médiocres constituent même un atout pour capter les IDE à partir du moment où le pays est riche en ressources. C’est le cas pour des pays comme le Venezuela, l’Algérie ou la Russie.


La question de base posée par l’article était de déterminer les facteurs des IDE émis par les pays du sud, à savoir les pays en développement et émergents. Une partie de la réponse réside dans la recherche par les investisseurs de meilleures institutions que celles présentes dans leur pays. A titre d’exemple, moins de corruption peut être bénéfique pour les affaires. Un facteur essentiel va également être la proximité géographique et culturelle, tandis que les investisseurs du nord vont d’abord se concentrer sur la taille du marché du pays d’accueil. Enfin, lorsque les investissements se font vers un pays avec une forte dotation en ressources naturelles, la présence d’institutions de moins bonne qualité comparativement au pays d’accueil n’est plus un frein à l’IDE, et peut même être perçue comme un atout. Cela s’explique notamment par le fait que l’exploitation de ressources naturelles peut être encouragée et facilitée par un faible cadre institutionnel. D’un point de vue économétrique, ce résultat ne tient que pour les IDE issus des pays du Sud et non pour ceux du Nord. Or, on pourrait s’interroger sur cette conclusion étant donné la présence d’entreprises ou de filiales issues des pays du « Nord » dans les secteurs extractifs de pays, notamment d’Afrique qui ont généralement de moins bonnes institutions.


D’une manière générale, l’article montre que les comportements d’investissements diffèrent entre « Nord » et « Sud » et que ces IDE ne sont pas substituables mais complémentaires, car ne visant pas les mêmes pays et les mêmes secteurs. Ainsi, l’émergence de nouveaux acteurs ne doit pas être perçue comme une menace pour les pays dits du Nord.





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